Ainsi que vous ne le savez peut-être pas, j'ai changé de compagne en février dernier. L'ancienne me fatiguait vraiment, genre pénible, toujours à geindre, se plaindre et, globalement, faire en sorte que les plaisirs des interactions, pourtant fréquentes (on ne se refait pas) soient réduits au strict minimum, voire à rien du tout.

Donc, une nouvelle, une douce, une jeune, une qui ronronne quand il faut, un véritable plaisir. Joie et bonheur.

Sauf que Madame mon irrégulière vit assez mal cette situation. Car, si sa flamboyance n'est en rien altérée, si elle attire toujours autant d'envieux regards, elle rend de nombreuses années à la nouvelle. De manière symptomatique, Madame a commencé à faire la tête en février, juste avant que je ne prenne la décision de me séparer de celle qui m'accompagnait depuis presque 15 ans. Etait-ce de l'intuition féminine ? Je ne sais, toujours est-il que depuis cette période, nos interactions sont devenues non pas chaotiques, mais un peu tendues.

Peu enclin à supporter des sautes d'humeur imprévisibles, j'ai progressivement mis une certaine distance entre elle et moi. Pour la première fois depuis de longues années, je ne suis pas parti en vacances d'été avec Madame mais avec la nouvelle, ce qui a d'ailleurs surpris plus d'un dans ma famille. Un tel acte risquait, je le savais bien, d'envenimer la situation. Quoi qu'il en puisse paraître, cela me dérangeait un peu d'aller à la rupture. Non seulement elle ne serait pas facile du tout, mais je n'en ai pas réellement envie. Pour ne pas dire que je n'ai pas envie du tout de quitter Madame.

Il y a deux semaines, donc, j'ai souhaité renouer les fils décousus, raviver la passion, bref prendre le temps d'un week-end pour refaire connaissance, dans quelques enchanteurs endroits de la région de par ici.

Ce fut une catastrophe. Si tout semblait de prime abord parfaitement normal, je me suis vu opposer un refus net, catégorique et assez définitif lorsqu'il fut temps de passer, comme on dit vulgairement, aux choses sérieuses. Malgré tous mes efforts, pas la moindre étincelle ne permit de lancer l'admirable créature dans ce que j'aurais souhaité être de longues et voluptueuses cavalcades. N'étant guère enclin à forcer l'issue, et n'ayant nul goût dans pareille situation pour tempêter, maudire et invectiver, je me retirai et retournai en mes pénates, fort marri.

Il est de notoriété publique que les cadeaux permettent d'amadouer les plus noires colères. J'avais cru comprendre, lors de ma tentative avortée, ce qui aurait réellement fait plaisir à Madame. Connaissant ses besoins et ses mensurations, j'allai acheter l'objet en question dans un magasin hautement spécialisé - il me faut reconnaître que ça ne se trouve pas dans la boutique du coin. Le week-end dernier, je revins vers elle lui faire mon présent. L'offrande fut acceptée, ce dont je ne doutai pas un seul instant.

Las ! Rien n'y fit, la belle resta de marbre malgré mes sollicitations empressées. La frustration pointait son nez, accompagnée d'une légère irritation, lorsque je me souvins d'un détail qui, en réalité, n'en était pas un du tout. D'un mouvement lent mais déterminé je pressai sur le point sensible avec l'objet approprié, et les portes de la félicité s'ouvrirent alors en grand, la belle ne me refusant plus rien.

Moralité : les alarmes coupe-circuit sur les voitures, c'est comme une ceinture de chasteté, vaut mieux savoir qu'elles sont là et comment les désactiver si on veut profiter de ce qu'elles protègent.

Conclusion : j'ai une batterie 95Ah à vendre, parfait état, bien chargée et tout, si ça intéresse quelqu'un...